OGM : FANTASMES ET REALITES – Le point de vue d’un généticien

Double Hélice ADN

Suite à un article de Tristan, et surtout à force d’expliquer à droite à gauche ce que sont les OGM, ce qu’il en est, ce qui se dit, ce qui ne se dit pas, mon père a fini par rédiger un texte qui synthétise assez clairement les nombreux mois de travail passés sur le sujet. Comme il serait fort dommage que cet article ne circule que par e-mail sous le manteau, on s’est dit qu’on allait le publier là…

C’est un peu long à lire à l’écran, mais si le sujet vous intéresse un tant soit peu, je pense qu’il serait fort dommage de passer à côté. Pour ceux qui veulent, un PDF est disponible.

[UPDATE] : Mon paternel s’étant décidé à créer son blog, une mise à jour de cet article est disponible sur Les pieds dans le plat.

Bonne lecture !


Depuis plus de dix ans, les OGM sont au centre d’une controverse qui n’est ni des plus claires, ni des plus sereines et cet état de choses a plutôt tendance à s’aggraver au fil du temps. Ce qui était au départ un simple débat a pris des allures de polémique, pour ne pas dire plus.

Une première condition indispensable pour qui veut tenter de clarifier les choses est de dissocier deux aspects très différents de cette question, l’un relevant du domaine scientifique, l’autre de questionnements socio-économiques et éthiques.

  1. L’aspect scientifique comporte lui-même deux volets. Le premier relève directement de la génétique : les OGM représentent-ils quelque chose de radicalement nouveau dans le monde vivant ? L’autre concerne leurs risques et avantages éventuels.
  2. L’aspect socio-économique peut se résumer en une question : les OGM, au bénéfice de qui ? Mais cette question en cache une autre, bien plus cruciale : faut-il accepter la privatisation du patrimoine génétique des êtres vivants ?

Ces deux aspects sont constamment amalgamés dans le débat public. La distinction entre eux est pourtant essentielle car ils peuvent conduire à des prises de position très différentes.

Qu’est-ce qu’un OGM ?

Le sigle OGM signifie « Organisme Génétiquement Modifié ». On entend par là un type de modification qui consiste à insérer, dans les chromosomes d’une espèce vivante, une molécule d’ADN[1] étrangère. Cette opération est possible grâce à des enzymes qui permettent de couper et de ligaturer avec précision des filaments d’ADN. La molécule insérée peut soit correspondre à un ou plusieurs gènes qui apportent de nouvelles fonctions à l’hôte soit, au contraire, aller bloquer le fonctionnement d’un gène donc supprimer une fonction indésirable. Cette opération entre dans le cadre du génie génétique, on parle de transgénèse. L’organisme ainsi modifié est dit transgénique. Le ou les gènes transférés peuvent provenir d’un autre individu de la même espèce, d’une autre espèce ou même d’un autre type d’organisme. Ainsi un gène de bactérie peut être transféré dans un animal ou dans une plante et réciproquement.

Ici nous parlerons surtout des plantes génétiquement modifiées (PGM), puisque ce sont elles qui sont au centre de la controverse.

Avant de disposer de cette technologie, comment procédaient les agriculteurs, et les chercheurs en amélioration des plantes, pour augmenter les qualités agronomiques des plantes cultivées ? La première méthode, probablement utilisée dès les débuts de l’agriculture, est une sélection très empirique : dans un champ, on choisit les plants qui présentent la meilleure qualité et on s’en sert pour obtenir les semences de la génération suivante. Depuis le début du XXe siècle on utilise des méthodes plus sophistiquées : production de mutations au hasard avec des agents mutagènes chimiques ou physiques (certaines radiations) ; croisements avec d’autres variétés ou espèces voisines pour introduire des gènes intéressants (de résistance aux maladies par exemple). Cette dernière méthode était la plus utilisée jusqu’à ces dernières années. Il s’agit donc bien de créer des plantes génétiquement modifiées, mais avec des méthodes dites « classiques », bien qu’elles ne se contentent pas toujours d’imiter des voies naturelles. Certaines font appel à des techniques élaborées (la mutagénèse notamment).

Pour un chercheur en amélioration des plantes la transgénèse a l’avantage :

  1. d’être plus rapide et plus ciblée que les techniques antérieures. On peut introduire un seul gène dans un génome au lieu de centaines, plus ou moins au hasard, avec des caractères non souhaités, comme c’est le cas avec un croisement ;
  2. de rendre possible le transfert de gènes entre organismes très différents, par exemple d’une bactérie vers une plante, ce qui est évidemment impossible par croisement.

La transgénèse et les techniques traditionnelles de croisement ne s’excluent pas ; dans certains cas, elles sont même très complémentaires.

L’Homme et la Nature

Les principales inquiétudes exprimées sur les plantes transgéniques sont liées à la technologie elle-même, qui est perçue comme radicalement différente des méthodes classiques de sélection. On lui oppose deux grandes objections.

La première objection est qu’elle ne respecte pas la « barrière d’espèce » puisqu’elle permet des échanges génétiques entre espèces différentes, transgressant ainsi une loi fondamentale de la nature, une sorte de tabou mystique. C’est le mythe de l’apprenti sorcier ou du savant fou, qui motive une hostilité de principe aux PGM chez beaucoup d’opposants.

On retrouve là un très ancien penchant à la sacralisation du ‘naturel’, assez largement répandu, qui va de pair avec la croyance que « c’est naturel donc c’est bon ». Sous-entendu : ce que fait l’homme est artificiel donc mauvais. Dans cette logique, il faut alors admettre qu’il n’y a jamais eu grand-chose de bon pour les humains depuis les temps lointains où ils se sont mis à tailler des pierres pour en faire des outils. Est-il naturel d’habiter dans des maisons et d’utiliser l’électricité ou la voiture ? Cette sacralisation du naturel va de pair avec le vieux mythe de la « Mère Nature », peut-être très poétique, mais pas du tout réaliste. Les actes de férocité et les poisons abondent dans le monde vivant.
Cette inquiétude sur le tabou de la « barrière d’espèce » n’est pas nouvelle, elle avait été émise et débattue par les chercheurs eux-mêmes entre les années 1974 et 76, dès que les techniques de génie génétique ont été mises au point et utilisées comme outils de recherche en laboratoire. Elle les a même amenés à décider d’un moratoire de près de 2 ans sur ce type d’expérience.
Depuis cette époque, la génétique nous a appris que les transferts de gènes interspécifiques existent bel et bien dans les conditions naturelles. Ce processus est appelé « transfert horizontal », par opposition au transfert vertical, qui se fait d’une génération à l’autre par la reproduction sexuée. Sa fréquence est faible, mais vu la durée de l’évolution biologique, son accumulation au fil des âges a due être considérable.
C’est maintenant un fait bien acquis, tous les êtres vivants de notre planète sont le résultat d’une évolution de plus de 3 milliards d’années où se sont produits des échanges génétiques de toutes sortes entre espèces et entre organismes très différents. Ceux qui apportaient une innovation avantageuse ont été favorisés par le jeu de la sélection naturelle et se sont perpétués au fil de l’évolution. La question que se posent maintenant les évolutionnistes est celle de l’impact de ces transferts sur le déroulement du processus évolutif : négligeable ou essentiel ? A suivre.
Mais la transgénèse naturelle (ou spontanée) ne se produit pas uniquement de façon sporadique au fil des âges géologiques. Pour certains organismes, elle fait partie intégrante de leur mode de vie.

  • Chez les bactéries, elle est monnaie courante et permet le transfert, entre espèces très différentes, des gènes de résistance aux antibiotiques.
  • Certaines espèces bactériennes vont systématiquement insérer un petit groupe de leurs gènes, porté par un élément mobile (voir note 2), dans les chromosomes des plantes qu’elles infectent, amenant celles-ci à synthétiser des produits dont elles se nourrissent. Le mécanisme de cette transgénèse spontanée a d’ailleurs été utilisé par les chercheurs pour mettre au point la technologie des PGM.
  • Pour certaines familles de virus, dont les « rétrovirus » (le plus connu est le virus du SIDA, mais d’autres sont inoffensifs), l’insertion de leur génome dans les chromosomes de l’organisme infecté est une étape obligatoire de leur reproduction. C’est là aussi une transgénèse tout à fait spontanée. Des dérivés de ces virus ont été les premiers outils utilisés pour les essais de thérapie génique.
  • Une fois inséré dans un chromosome, le génome du rétrovirus peut se reproduire. Il peut alors arriver qu’un génome ’fils’ incorpore accidentellement un gène de la cellule hôte, il sera devenu transgénique. Lorsqu’il infectera des cellules d’un nouvel hôte, il apportera avec lui ce gène qui se retrouvera alors en surnombre. Si le rôle normal du gène en question est de contrôler la reproduction des cellules, ce surnombre pourra entraîner des divisions cellulaires anarchiques et aboutir à un cancer. On a donc là une double transgénèse, du virus et de l’hôte. C’est par ce mécanisme qu’un certain nombre de rétrovirus des oiseaux et des mammifères sont devenus cancérogènes.

Une telle manipulation serait absolument interdite en laboratoire. La transgénèse spontanée est du génie génétique « sauvage », personne n’en contrôle ni le mécanisme, ni les effets. Seul joue le hasard, qui ne connaît pas le principe de précaution !
Bref, tous les organismes du monde vivant, depuis les virus jusqu’à l’homme, sont le siège de génie génétique naturel. Ce fut une grande surprise pour les généticiens de découvrir, depuis la fin des années 70, que les génomes sont capables d’une grande plasticité. Cette découverte a conduit à une véritable rupture conceptuelle avec la vision fixiste héritée de la première moitié du XXe siècle.
«L’œuvre d’apprenti sorcier » n’est donc qu’une utilisation par les humains de mécanismes aussi anciens que le monde vivant. Précautions en plus !

La seconde objection faite à la transgénèse est que cette technologie est, en partie, aléatoire. L’insertion sur les chromosomes du gène transféré se fait au hasard et peut donc perturber le fonctionnement d’autres gènes. C’est vrai, mais pas vraiment gênant chez les plantes car on peut faire tous les contrôles nécessaires, sanitaires, écologiques et autres, sur une nouvelle variété avant de l’utiliser en agriculture. Nous venons d’ailleurs de voir que la transgénèse spontanée opérée par les rétrovirus est au moins aussi aléatoire. Ce qui n’est jamais dit par contre, et qui est pourtant connu depuis trente ans, c’est que par un simple croisement entre variétés d’une même espèce, on peut déclencher des perturbations génétiques bien plus importantes[2], comme par exemple des cassures et des pertes de chromosomes.

Enfin, il faut savoir qu’il se produit spontanément dans la nature des transferts génétiques bien plus conséquents que la simple transgénèse. Beaucoup de plantes, sauvages ou cultivées, sont nées de l’addition des génomes de deux ou trois espèces différentes, bien qu’assez proches. Dans ces cas-là, ce ne sont pas 2 ou 3 gènes d’une espèce qui sont transférés dans une autre, mais tous les chromosomes, c’est à dire des milliers de gènes. C’est le cas par exemple du blé et du colza. Le blé tendre cumule les génomes de trois espèces différentes. Le colza cumule les génomes du chou et du navet. Ces « fusions génomiques » se sont produites il y a des milliers d’années. L’homme n’y est pour rien, il a simplement choisi de cultiver ces espèces parce qu’elles présentaient un intérêt alimentaire. Là encore, la nature a franchi allègrement la barrière d’espèce. Les chercheurs savent, depuis le début du XXe siècle, reproduire ce type de phénomène pour créer de nouvelles espèces d’intérêt agronomique.

L’utilisation médicale des OGM montre bien que privilégier le naturel par rapport aux oeuvres humaines n’est pas justifié. Depuis plus de 20 ans, on fait synthétiser par des microorganismes transgéniques, bactéries ou levures, des molécules à usage médical. On dispose ainsi d’une insuline très pure, de facteurs de coagulation sanguine, d’un vaccin contre l’hépatite B et de l’hormone de croissance. Cette dernière est un très bon exemple. Jusqu’à la fin des années 80, les enfants atteints de nanisme étaient traités par des hormones préparées à partir d’hypophyses humaines. On a ainsi transmis à certains d’entre eux la maladie de Creutzfeldt-Jakob, l’équivalent humain de la vache folle. En 2007, on avait enregistré chez ces patients plus de 100 décès en France (chiffre non définitif car cette maladie est à évolution très lente). Dans tous les pays, depuis 1988, on traite ces enfants par de l’hormone produite par génie génétique, beaucoup plus pure et il n’y a plus de problème. On a une situation analogue pour les facteurs de coagulation, qui évitent maintenant aux hémophiles des transfusions risquées.
Ces microorganismes génétiquement modifiés constituent donc un progrès médical incontestable même s’il est limité, car il n’est pas possible de produire n’importe quelle protéine humaine par cette voie. L’utilisation de ces OGM est d’ailleurs bien acceptée maintenant.

Les risques et avantages possibles sur les plans écologiques et sanitaires.

La controverse sur les risques biologiques des plantes transgéniques est un sujet complexe qui nécessiterait un livre à lui seul, d’autant plus que les risques et avantages doivent être discutés au cas par cas, chaque PGM étant particulier.
Contrairement à des affirmations très répandues, ces questions sont l’objet, depuis une dizaine d’années, de multiples recherches dans le monde. On peut recenser, de 2000 à 2007, près de 8000 publications scientifiques et rapports d’organismes officiels sur les impacts agronomiques, écologiques et sanitaires des plantes transgéniques.
Nous nous limiterons aux risques les plus souvent invoqués et les plus crédibles, en signalant au passage quelques avantages parmi les mieux étudiés[3]. Nous laisserons de côté certaines craintes trop fantasmatiques[4]. Il ne faudra pas s’étonner de trouver ici des éléments de réflexion ou d’information qui n’apparaissent jamais dans la plupart des media. L’information scientifique n’est pas toujours leur premier souci.
D’abord une remarque d’ordre général. Dans toutes les activités humaines, un risque n’est jamais considéré isolément mais toujours en balance avec les avantages. C’est, entre autres, parce que les consommateurs en France ne voient pas bien quels avantages les plantes transgéniques leur apporteront qu’ils sont aussi sensibles aux risques éventuels. On admet sans problème de risquer sa vie en voiture parce qu’il est devenu difficile de se passer de véhicule. De même, certains qui sont opposés aux PGM donneront de l’argent au téléthon pour développer les recherches sur les thérapies géniques, en espérant accélérer la guérison de maladies génétiques. Pourtant la thérapie génique consiste à faire de la transgénèse sur des cellules somatiques[5] humaines !
Ouvrons une parenthèse sur cet exemple car il constitue l’un des paradoxes les plus singuliers de ce débat. Les mêmes qui s’inquiètent d’éventuels inconvénients, de toutes natures, qui pourraient résulter des PGM, restent totalement silencieux sur les thérapies géniques. Les risques qu’ils attribuent à la transgénèse seraient-ils moins inquiétants pour l’homme que pour les plantes ? Un paradoxe qui interpelle d’autant plus que, du côté des généticiens, les positions sont inverses. La très grande majorité d’entre eux ne voit pas d’objections de principe aux PGM, mais ils sont nombreux à être très réservés sur les thérapies géniques, arguments scientifiques à l’appui[6].
Mais revenons aux risques biologiques attribués aux PGM. Ils sont en gros de deux ordres : les risques pour la santé et les risques pour l’environnement et l’agriculture, disons « écologiques », au sens large du terme.

Les risques sanitaires invoqués portent sur la toxicité ou les allergies. Les recherches dans ces domaines ont fait l’objet de plus de 1000 publications et rapports depuis 7 ans.
Pour ce qui est des allergies, elles sont largement imprévisibles. Des précautions sont prises, à partir de méthodes d’analyses biochimiques, mais aucune ne permet de supprimer tous les risques d’allergie possibles. Certaines personnes sont allergiques aux fraises, aux kiwis, aux litchis ou à toutes sortes d’autres choses, les PGM ne constituent en aucune façon un cas à part.
Quant au risque de toxicité, il doit être évalué au cas par cas ; c’est le rôle des instances scientifiques spécialisées dont nous parlerons plus loin. Pour un bon résumé de l’état actuel des connaissances, citons Gérard PASCAL, directeur de recherche honoraire à l’INRA, spécialiste mondialement reconnu en nutrition et toxicité alimentaire : « Aucun risque avéré des PGM mises en culture –ou dont une demande d’autorisation de mise sur le marché a été déposée- n’a pu être révélé à ce jour par une quelconque étude scientifique réalisée selon un protocole reconnu au niveau international. Nous ne prétendons pas que le risque de ces plantes est nul mais il semble que le risque sanitaire qu’elles représentent n’est pas plus important que pour les aliments courants » (Janvier 2008).
Sur ces questions de toxicité, le maïs Bt nous fournit un élément de réflexion qui vaut la peine d’être connu et qui est complètement occulté dans le débat public. Cette plante transgénique a reçu un gène, venant de la bactérie Bacillus thurengiensis, qui lui permet de produire une protéine (dite Bt) tuant certains insectes, en particulier la pyrale et la sésamie, principaux ravageurs du maïs. Cette protéine est une variante d’une autre Bt, déjà utilisée depuis plus de 30 ans comme insecticide en agriculture biologique. Comme cette dernière, elle n’est pas toxique et très rapidement détruite par la cuisson et la digestion. En Angleterre, suite à un contrôle à l’automne 2003, 32 produits dérivés de maïs ‘bio’ ont dû être retirés du commerce, ils étaient contaminés par une mycotoxine dangereuse pour l’homme, une fumonisine. Les fumonisines sont une famille de toxines produites par des moisissures, les Fusarium. Elles sont très toxiques pour tous les mammifères, elles portent atteinte au système nerveux, au système immunitaire et sont cancérogènes.
Or, le développement des Fusarium chez le maïs est favorisé par les galeries creusées dans les tiges par la chenille mineuse de la pyrale. Ce qui signifie que la résistance à cet insecte diminue ipso facto l’infection par ces moisissures. Dès 1997, des travaux de recherche ont montré une nette diminution de la quantité de fumonisines chez les maïs Bt, par rapport aux maïs non transgéniques. Résultats largement confirmés depuis par plusieurs laboratoires.

En 2004, un rapport de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA) concluait à ce sujet : « Indubitablement, ce fait constitue un point positif dont il serait possible de tirer profit pour accroître la qualité sanitaire des alimentations humaine et animale. ».

Les risques écologiques sont aussi au centre d’un débat très conflictuel. Ils concernent en gros deux types de caractères, quelquefois réunis dans une même plante transgénique : soit on introduit un gène qui permet à la plante de synthétiser un insecticide pour se défendre contre des insectes ravageurs, soit on introduit un gène qui lui confère la résistance à un herbicide total. Dans tous les cas, les gènes viennent des bactéries.

Pour le cas des insecticides, reprenons l’exemple du maïs Bt. Actuellement, la méthode de lutte la plus répandue en Europe consiste à traiter les champs aux insecticides chimiques qui détruisent aussi des insectes utiles et sont toxiques pour d’autres animaux, notamment les oiseaux, et pour l’homme. Les nappes phréatiques sont également polluées car on recourt à des produits plus ou moins persistants.
Ce maïs transgénique permet d’éviter ces traitements chimiques, qui sont de toute façon moins efficaces car la chenille, dans ses galeries, est à l’abri des pulvérisations… contrairement à l’agriculteur !
Deux objections sont faites à ce maïs Bt : d’une part le risque de sélectionner des pyrales résistantes à cet insecticide, d’autre part le risque de tuer d’autres insectes non nuisibles. Des craintes qui sont d’ailleurs tout autant valables, sinon plus, pour les insecticides chimiques. Cependant il s’agit de problèmes bien réels qui ont fait et continuent à faire l’objet de recherches. Depuis 7 ans, on a recensé plus de 1000 publications (dont 208 pour les maïs) portant sur l’impact des PGM insecticides sur la faune non-cible : insectes, lombrics et autres. Ce qui semble en ressortir, c’est que les maïs Bt respecteraient mieux la faune non-cible que les insecticides classiques (contrairement aux idées répandues depuis la polémique sur le papillon monarque). Quant au risque de sélectionner des pyrales résistantes, on peut le limiter en utilisant la méthode dite des ‘zones refuges’, déjà bien connue des agronomes et obligatoire aux États-Unis depuis 2000. Il serait trop long de la décrire ici.
Rappelons aussi que de nombreuses plantes fabriquent naturellement des insecticides puissants dont certains, comme le pyrèthre, sont commercialisés.

Le cas des PGM résistantes aux herbicides est plus délicat. Il s’agit de résistance aux herbicides totaux comme le glyphosate (‘Roundup’ de Monsanto) et le glufosinate (‘Basta’, produit par Bayer). Chacune de ces firmes veut introduire, dans un maximum de plantes cultivées, le gène de résistance à l’herbicide qu’elle vend. Le but étant de vendre aux agriculteurs à la fois l’herbicide et la plante résistante à celui-ci.
On peut craindre que le gène de résistance se transmette à d’autres espèces et qu’à la longue se multiplient les plantes résistantes à ces herbicides totaux, ce qui pourrait devenir très gênant pour les grandes cultures. Ce risque existe pour le colza et pour la betterave car ces deux espèces sont proches parentes de certaines mauvaises herbes et peuvent se croiser avec elles[7]. De plus, le colza peut être aussi envahissant qu’une mauvaise herbe (fait exceptionnel pour une plante cultivée). Pour ces raisons, les cultures de colza et de betterave résistants aux herbicides ne sont pas autorisées en France, en attendant les résultats d’études plus poussées.
Mais, de toute façon, le risque de sélectionner des mauvaises herbes résistantes existe avec l’épandage actuel d’herbicides sur les cultures conventionnelles. C’est d’ailleurs déjà fait, des mutations de résistance spontanées ont été identifiées dans de nombreuses espèces sauvages et peuvent donc se répandre et se propager à des espèces voisines.
Les travaux de recherche sur les impacts économiques et écologiques de ces PGM résistants aux pesticides sont nombreux (près de 700 publications depuis 2000) et se poursuivent activement dans tous les pays où ils sont cultivés. Les résultats varient selon la plante et le pays concernés. Dans les grandes lignes, il en ressort qu’ils facilitent les conditions de culture et que les quantités de pesticides chimiques répandues en sont diminuées. Pour le coton Bt, aux États-Unis et en Chine, on utilise 3 à 5 fois moins d’insecticides chimiques que pour le coton conventionnel.

Le problème de la coexistence entre filières PGM et non-PGM.

C’est surtout en Europe que ce problème est posé. Plus particulièrement en France, où il constitue un point fort de la polémique. Malgré cela, nous passerons rapidement car l’importance accordée à cette question dépend surtout de la perception que l’on a de l’innocuité ou de la dangerosité des plantes transgéniques. Il est évident, là encore, que les inquiétudes sont directement liées à l’image de dangereuse invention contre nature que certains associent à la transgénèse. En effet, pour les plantes conventionnelles, personne n’a jamais exigé une absence de « contamination » entre produits issus de différentes variétés.
Pour organiser la coexistence entre les deux types de filières, PGM et non-PGM, il faut d’abord éviter la dissémination des transgènes par le pollen. Ce risque est très différent selon les espèces. Pour celles qui sont cultivées par multiplication végétative, comme la pomme de terre (on plante des tubercules), ce risque est nul, pour le maïs il existe réellement. Cette question a fait l’objet de 1500 publications et rapports depuis 7 ans, dont 170 pour le maïs. Des solutions techniques sont déjà connues, elles sont utilisées depuis longtemps pour reproduire les variétés classiques. Il reste toujours un léger « bruit de fond », comme disent les agronomes, mais il n’a pas empêché de maintenir la pureté de ces variétés.
Mais pour faire coexister les deux types de filières, il ne suffit pas de contrôler la dissémination du pollen, il faut aussi mettre en place une séparation complète au niveau de la collecte, du stockage, du transport et de la transformation en produit commercial.
Aux États-Unis, il n’y a aucun étiquetage particulier pour les OGM. Au Japon, le taux d’OGM accepté pour les produits étiquetés « sans OGM » (seuil d’étiquetage) est de 5%. L’Union Européenne s’oriente vers un seuil à 0,9%.

L’évaluation des risques.

Les variétés végétales obtenues par les méthodes conventionnelles font l’objet, avant commercialisation, de tests sur leur valeur agronomique mais rarement d’expertises sanitaires ou écologiques. Par contre, les plantes transgéniques et les produits qui en dérivent sont soumis à des réglementations strictes et évalués par des instances spécialisées. Ce sont actuellement, et de loin, les aliments les plus contrôlés. Cette différence de traitement n’est pas vraiment dictée par des considérations scientifiques mais plutôt par les inquiétudes du public vis à vis des PGM.

En France, les instances d’évaluation sont essentiellement :

  • la Commission de Génie Biomoléculaire (CGB), créée en 1986, chargée de l’évaluation des risques sanitaires et écologiques pour chaque demande de mise sur le marché d’une variété transgénique ;
  • l’AFSSA, que nous avons déjà citée. C’est un établissement public créé en 1999. Elle a un « rôle de veille, d’alerte, d’expertise, de recherche et d’impulsion de la recherche, contribue à l’amélioration de la santé publique, de la santé et du bien-être des animaux, de la santé des végétaux et de la qualité sanitaire de l’environnement ». Sa ‘Commission des Biotechnologies’ doit plus particulièrement évaluer la sécurité sanitaire des demandes de mise sur le marché des produits issus d’OGM (y compris les microorganismes) et des semences de plantes transgéniques[8]. Au niveau de l’UE, existe un organisme équivalent : la « European Food and Safety Authority » (EFSA – en français : AESA)

On pourrait rajouter le Comité Technique Permanent de la Sélection (CTPS), bien que ses expertises ne soient pas réservées aux seules PGM et qu’il s’intéresse surtout à la valeur agronomique des variétés et à leur stabilité génétique.
Les évaluations sont donc diversifiées, elles doivent être convergentes pour qu’il y ait autorisation. Ces instances sont très exigeantes, il est même arrivé que sur certains dossiers la CGB et l’AFSSA rivalisent de précautions.

Mais l’étude des risques ne s’arrête pas aux demandes de mises sur le marché.

  • Un Comité de Biovigilance, dépendant du ministère de l’environnement a été créé en 1998, puis réactualisé en 2003 et en 2005, il est chargé du suivi des risques théoriques, pour l’environnement, des PGM mises en culture, en particulier du contrôle de la séparation des filières PGM et non-PGM.
  • Enfin, l’Agence Nationale de la Recherche, créée en 2005, a également un conseil scientifique qui finance des programmes de recherche dans tous les domaines qui peuvent être concernés par les PGM : environnement, santé humaine et animale, problèmes sociaux et éthiques.

Dans de nombreux pays américains et européens, des laboratoires universitaires font également des recherches de ce type. Pour l’Europe c’est surtout le cas en Espagne où les cultures de plantes transgéniques sont assez répandues.

Les PGM pour quoi faire et au bénéfice de qui ?

Nous quittons maintenant le domaine scientifique pour entrer dans les aspects socio-économiques et géopolitiques. Il s’agira juste d’un survol, d’une part parce que ce sujet est lui aussi très vaste, d’autre part parce que l’opinion que l’on peut en avoir dépend essentiellement des convictions éthiques et idéologiques de chacun.
Dans les pays riches et dans les pays pauvres, les problèmes agricoles se posent en des termes très différents. Les premiers sont déjà excédentaires et exportent leurs surplus. Il n’y a donc aucune nécessité vitale pour eux d’augmenter la production de 5 ou 10%. Par contre ils doivent produire de façon moins polluante, en diminuant l’utilisation des intrants (pesticides et engrais)[9].
Pour les pays pauvres, le problème de la quantité de production est vital. Non seulement les surfaces cultivables sont souvent insuffisantes au regard de la population, mais pour les principales céréales (blé, riz, maïs), les pertes annuelles des pays où aucun traitement n’est fait (dues aux maladies, ravageurs et mauvaises herbes) peuvent dépasser 50% pour le blé, contre 18% en Europe de l’ouest. Pour le riz et le cotonnier cultivés sans traitements, les pertes moyennes dépassent 80%.
Des études économiques de la FAO affirment que la production agricole actuelle serait suffisante pour toute la planète. Certains en concluent que le problème de la malnutrition dans le tiers monde pourrait être résolu par une redistribution des ressources alimentaires. C’est une conclusion trop hâtive, pour au moins deux raisons.

  1. Cette redistribution des pays riches vers les pays pauvres peut être utilisée comme un moyen de maintenir une dépendance néocoloniale. On parle même de « l’arme alimentaire ». De plus, la mondialisation commerciale a des effets très pervers. Actuellement les subventions, ouvertes ou déguisées, des gouvernements des États-Unis et d’Europe permettent à leurs agriculteurs non seulement de concurrencer les pays du tiers-monde sur les marchés extérieurs (cas du coton), mais même sur leurs propres marchés (cas du blé et des fruits et légumes). Notre système économique mondial démantèle donc encore plus l’agriculture de ces pays au lieu de les aider.
  2. Il est prévu que la population mondiale atteigne 9,5 milliards d’habitants entre 2050 et 2100. Or les ressources agricoles mondiales actuelles ne sont pas indéfiniment extensibles, elles peuvent devenir insuffisantes. On estime qu’il faut maintenir une augmentation de la production végétale mondiale de l’ordre de 2,5% par an. Mais il vient s’ajouter maintenant un autre danger : la production des agrocarburants, qui risque de détourner d’immenses surfaces de cultures alimentaires. C’est déjà fait aux États-Unis pour le maïs.

La crise alimentaire qui éclate en cette année 2008, avec ses très graves conséquences pour les pays les plus pauvres, vient confirmer toutes ces inquiétudes. La seule solution valable pour les pays en développement est d’augmenter leur production de cultures vivrières pour devenir autosuffisants. La souveraineté alimentaire est essentielle pour garantir l’indépendance de tous les peuples, mais plus encore pour les pays du tiers monde.
Beaucoup de chercheurs en agronomie sont convaincus que les recherches sur les PGM pourraient contribuer, dans un avenir proche, à atteindre les buts énoncés plus haut : réduction de la pollution agricole dans les pays riches et augmentation d’une production non polluante dans les autres. Pour ces derniers, les possibilités les plus couramment envisagées sont l’obtention de résistances aux maladies et de tolérances aux conditions extrêmes : sécheresse, froid, salinité, qui permettraient de cultiver des sols qui sont, ou seront bientôt, inutilisables.
Du point de vue strictement technologique c’est certainement vrai. Soumis au contrôle d’organismes publics, le génie génétique peut être d’une aide appréciable dans certains domaines. Nous avons vu que c’est déjà le cas pour la santé.
Mais notre système économique mondial actuel va-t-il réellement dans ce sens ? Citons un texte de la FAO de 2004 : « Les recherches sur les cultures transgéniques sont, pour la majorité, le fait de sociétés privées transnationales. Cette situation est lourde de conséquences pour le type de recherches effectivement engagées, ainsi que pour les produits élaborés. (…) Les plantes et les caractéristiques présentant un intérêt pour les pays pauvres sont dédaignées. »[10]. Avec la mondialisation néolibérale, les PGM risquent de n’être qu’un instrument de plus dans la concurrence entre les firmes semencières et entre les Etats riches ou émergents. Dans ce contexte de guerre économique, le danger est grand que ces nouveaux outils n’aggravent les problèmes alimentaires et écologiques urgents, au lieu de contribuer à les résoudre.

Les risques des PGM ou l’arbre qui cache la forêt

Le fait que le débat public porte presque uniquement sur les risques supposés des plantes génétiquement modifiées masque un enjeu essentiel : la « privatisation du vivant », pour utiliser un raccourci un peu rapide. La question se pose depuis trois décennies et dépasse largement le cadre de l’agriculture. Dans le contexte économique mondial actuel nous allons, par le biais du brevetage, vers une privatisation des patrimoines génétiques des êtres vivants, génome humain compris. Toutes choses qui font partie du bien commun de l’humanité, générations présentes et futures, et ne doivent en aucun cas être aliénées au profit de quelques empires industriels et financiers. C’est un problème socio-économique mais aussi une question éthique fondamentale qui est au moins aussi sensible dans le domaine médical que dans l’agriculture.
Pour les agriculteurs, il est essentiel de disposer d’un grand éventail de variétés cultivées pour que chacun puisse choisir les mieux adaptées à son terroir et à ses méthodes de culture. Or, les brevets et la concentration des entreprises semencières risquent d’amener la réduction de la diversité des variétés cultivables. De plus, les paysans du tiers monde doivent pouvoir ressemer des graines de leur propre récolte, ce qu’interdisent les brevets. C’est certainement pour eux que cette situation est la plus inquiétante et ils constituent la majorité des habitants de la planète.
Le système actuel des brevets sur les biotechnologies a été élaboré en 1980 aux États-Unis, pour la protection commerciale de souches de bactéries qui métabolisent les hydrocarbures. Depuis, sous la pression de ce pays, où les groupes dominants ont imposé une législation particulièrement dure, il se généralise, aussi bien en agronomie qu’en médecine, par l’effet de la concurrence commerciale mondialisée. Un pays qui refuserait de breveter ses innovations se les verrait confisquées par des firmes étrangères qu’il devrait alors rétribuer pour les utiliser.
La protection des brevets en vigueur aux États-Unis est d’une telle rigidité qu’elle a des effets négatifs flagrants et soulève de plus en plus de critiques. Ce système s’avère complètement inadapté à la complexité du vivant. Non seulement il constitue un frein aux innovations, mais il multiplie les contentieux juridiques entre les multinationales elles-mêmes.
C’est l’un des facteurs qui pousse à la concentration croissante des firmes depuis la fin des années 90, aussi bien dans l’industrie pharmaceutique que chez les semenciers. Chez ces derniers, il y a actuellement 6 groupes dominants au niveau mondial. Citons à ce propos une phrase de P.B. JOLY et B. HERVIEU[11] : « Dans le domaine des biotechnologies, les brevets sont l’instrument de domination de quelques puissantes multinationales qui concentrent les capacités de recherche et tentent de s’approprier les ressources génétiques ». L’exemple de Monsanto, qui contrôle à elle seule près de 90% des cultures transgéniques dans le monde, montre bien que ce danger n’est pas imaginaire. C’est une situation très préoccupante qui constitue l’un des éléments déterminants du débat actuel, poussant certaines organisations paysannes à une opposition radicale aux plantes transgéniques. Pourtant ce n’est pas la transgénèse qui est en cause, mais le brevetage et les pratiques des multinationales.
Pour compléter ce rapide tableau des dangers des brevets, tournons-nous du côté de l’industrie pharmaceutique. Citons juste deux exemples :

  1. Les procès que les grandes firmes de ce secteur ont voulu intenter au gouvernement de l’Afrique du Sud à propos des médicaments contre le SIDA.
  2. Ce que certains appellent la « biopiraterie », une dérive qui consiste à breveter, donc à s’approprier, des substances issues de plantes médicinales utilisées depuis des siècles par des peuples du tiers monde. Il s’agit là de pillage, tout simplement.

Quelles alternatives possibles ?

On peut évidemment rêver d’une suppression pure et simple des brevets et d’une exclusivité des organismes publics sur les recherches. D’un point de vue éthique, il serait tout à fait justifié que des secteurs aussi vitaux que l’agriculture et la santé soient totalement soustraits aux appétits financiers. Le moins que l’on puisse dire est que la politique mondiale actuelle ne va pas dans ce sens ! Cette vision est donc pour le moment utopiste d’autant plus que, pour les raisons vues plus haut, une telle solution n’est viable que si elle est adoptée par tous les pays du monde. Mais dans l’immédiat, d’autres solutions sont envisageables, forcément différentes selon les régions du monde et les types de cultures, et certaines sont déjà opérationnelles.
Une première mesure essentielle consisterait déjà à exclure du champ des brevets les gènes eux-mêmes. C’était le cas de la loi française jusqu’en décembre 2004. Depuis, la transposition de la directive européenne autorise dans certaines conditions leur brevetage.
Il est possible aussi de développer les modèles de mutualisation des ressources variétales qui existent déjà de par le monde. Certains de ces modèles se situent aux antipodes de la stratégie des multinationales et sont basés sur le principe de la « conservation à la ferme ». C’est le cas des « initiatives de sélection et de gestion participative », déjà bien structurés dans certains pays (Syrie, Mexique, Italie). Il s’agit de réseaux de paysans échangeant et valorisant des variétés anciennes. Cela se fait quelquefois en relation étroite avec les consommateurs, comme dans le cas des « Associations pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne » (AMAP) bien connues en Provence. A partir de celles-ci, se met maintenant en place le réseau « Urgenci » qui se définit comme un « réseau mondial des partenariats locaux solidaires entre producteurs et consommateurs ». L’intérêt citoyen de ce système alternatif est qu’il se construit sur la base de préoccupations économiques et sanitaires mais aussi éthiques (la solidarité).
Des systèmes intermédiaires, à partir d’organismes officiels, ont aussi été créés qui visent à favoriser une « mutualisation des ressources génétiques ». On en a un exemple en France avec le programme « Génoplante » qui regroupe des organismes de recherche publique, des sociétés privées et des organisations d’agriculteurs, dans le but de mutualiser les moyens de recherche entre tous ces acteurs. Ce programme a été créé en 1999, avec un poids important des agriculteurs et des organismes publics. On pourrait imaginer qu’il soit prolongé par un système de mutualisation des brevets, ce qui changerait leur nature même. Un aspect particulièrement intéressant de Génoplante est que les agriculteurs des pays en voie de développement ont un libre accès aux résultats des recherches, permettant ainsi des transferts de technologie. Des scientifiques essaient de promouvoir cette expérience au niveau de l’Europe, comme alternative à la privatisation des ressources génétiques.

Brèves réflexions sur la controverse

Le débat actuel présente à la fois des aspects positifs et d’autres plus inquiétants. Le côté positif est de montrer aux décideurs économiques et politiques que les citoyens, après les tristes affaires du sang contaminé et de la vache folle (où les chercheurs n’avaient rien à voir, soit dit en passant), en ont assez d’être le jouet de sordides affaires de profits financiers. De plus, les inconvénients de l’agriculture intensive sur l’environnement et l’alimentation commencent à être perçus de tous, grand public comme spécialistes. Les citoyens exigent d’être mieux informés et plus impliqués dans les instances de décisions. Le « tais-toi et mange » n’est plus de mode ! Ce débat amène aussi les chercheurs à prendre conscience que leurs recherches ne sont pas politiquement neutres et qu’ils doivent se sentir concernés par les utilisations qui en sont faites. C’est tout le rapport entre science et démocratie qui est en cause. Vaste programme, surtout dans le contexte politique actuel !
Pourtant, la controverse ne peut avoir un sens et un intérêt que si elle permet de faire la part des vrais problèmes et des peurs irrationnelles, voire superstitieuses, et de ne pas se tromper de cible. Actuellement, c’est d’autant moins le cas que ces peurs sont exploitées par certains à des fins personnelles ou politiques et par d’autres à des fins commerciales. Beaucoup de media préfèrent l’émotionnel et le « thriller » à la véritable information, c’est bien plus « vendeur ». On peut aussi s’inquiéter que, dans ce conflit, apparaissent de plus en plus souvent des relents, parfois inconscients peut-être, d’anti-recherche et d’anti-science. C’est toujours de très mauvais augure pour une société, même si on doit aussi se garder de la dérive scientiste. Il est devenu évident que certains courants d’idées remettent en question la démarche scientifique elle-même, c’est à dire les progrès de la connaissance, et pas seulement ses retombées technologiques. Ils contribuent ainsi à la résurgence actuelle de toutes sortes d’obscurantismes, dont l’un des plus marquants est le créationnisme. Ce dernier n’est d’ailleurs pas sans rapport avec la sacralisation du naturel, évoquée plus haut, à forte connotation religieuse elle aussi.

Certains droits réservés
Jean-Claude Bregliano
Généticien
Professeur des Universités retraité

N. B. : Je remercie mes collègues de l’Université et de l’INRA qui, en me faisant bénéficier de leurs compétences, m’ont aidé pour la rédaction de ce texte.
Crédit photo : Alvy sous licence Creative Commons.

Notes

[1] Petit condensé de biologie : L’unité de base de tous les êtres vivants est la cellule. Les êtres les plus simples sont constitués d’une seule cellule, les plus complexes peuvent être composés de milliards de cellules (environ cent mille milliards pour un être humain). Les chromosomes sont situés dans le noyau des cellules, ils sont constitués de très longues molécules d’ADN. Un gène est un segment d’ADN qui permet la synthèse d’une protéine, qui va elle-même remplir une fonction bien précise dans la cellule. Le génome peut être défini comme l’ensemble des gènes nécessaires à la vie d’un individu. Ce dernier point est très simplificateur car le génome contient aussi une très grande quantité de séquences d’ADN qui ne sont pas des gènes ‘classiques’; par exemple les éléments génétiques mobiles (voir note 2).

[2] Elles sont dues à des éléments génétiques mobiles (des sortes de ‘gènes sauteurs’), qui sont insérés dans les chromosomes et peuvent changer de position. Ils existent chez tous les êtres vivants, des bactéries jusqu’à l’homme ; ils font partie intégrante de leurs génomes et peuvent parfois se transmettre d’une espèce à une autre. Certains d’entre eux sont très apparentés aux rétrovirus. Un stress physiologique ou un croisement, en perturbant leur régulation, peuvent déclencher chez eux une mobilité excessive, source d’anomalies génétiques (voir l’Encyclopaedia Universalis, articles de l’auteur).

[3] Le lecteur qui souhaiterait avoir des données beaucoup plus détaillées peut se reporter au livre d’André Gallais et Agnès Ricroch : « Les plantes transgéniques : faits et enjeux », paru en 2006 aux éditions Quae (éditions de l’INRA).

[4] L’un des plus beaux exemples est sans conteste la peur d’une « pollution génétique irréversible de la planète ». Dans l’imaginaire de certains, l’invasion d’OGM aux pouvoirs maléfiques a remplacé celle des petits martiens verts (seule la couleur n’a pas changé !).

[5] On appelle cellules somatiques toutes les cellules de notre corps, à l’exception des cellules reproductrices.

[6] Les essais de thérapies géniques conduits depuis 20 ans dans le monde ont entraîné un grand nombre de complications médicales, y compris des décès.

[7] Pour le maïs, la tomate et la pomme de terre ce problème n’existe pas en Europe. Ces plantes, originaires du ‘nouveau monde’, sont génétiquement très isolées sur notre continent où n’existe aucune espèce apparentée.

[8] Les avis et rapports de l’AFSSA sont en libre accès sur internet dans leur intégralité.

[9] En France, un rapport de 2005 alerte les pouvoirs publics sur le fait que près de 9000 pesticides différents sont en vente. De plus, notre pays arrive au deuxième rang mondial pour le tonnage de pesticides utilisés.

[10] La situation est exactement la même pour les médicaments.

[11] Ces deux auteurs sont directeurs de recherche à l’INRA, économistes et sociologues. Beaucoup d’informations sur les solutions alternatives sont issues d’un de leurs articles, paru en 2003 dans la revue ‘Futuribles’ et intitulé : « La ‘marchandisation du vivant’. Pour une mutualisation des recherches en génomique ».

22 commentaires

  • OGM : FANTASMES ET REALITES – Le point de vue d’un

    Une info propre (sans lobbying derrière) et rédigée par un scientifique sur ce que sont les OGM et les risques qu’ils font courir… ou pas. Le texte est long (c’est pas simple), mais ça vaut le détour !…

  • Articles sur les OGM

    Vu sur stanblog, un article sur les ogm (que je lirai quand j’aurai le temps). Rédigé par Jean-Claude Bregliano, Généticien et Professeur des Universités retraité. Le texte est long mais surement très intéressant. A lire ici : souslestoits.net….

  • OGM : démystifions !

    Le Grand Satan expliqué par un généticien dans un texte de qualité. Je me suis moi-même ici ému de la diversité et des incohérences du mouvement "écologiste" qui est pour le moins hétérogène. Il y a quelques temps,j’avais même écrit un…

  • […] des compléments d’information en réponse aux commentaires et questions des lecteurs : http://www.souslestoits.net/ogm Notes de bas de page    ( ↑ retour au […]

  • Bonjour,
    J’aimerais réagir à votre article, au demeurant très instructif, en apportant des éléments sur lesquels j’aimerais avoir votre avis d’expert.

    Du point de vue scientifique :
    J’ai le souvenir que les méthodes de transgenèse utilisent des marqueurs qui permettent d’identifier les cellules ayant correctement intégré l’insert. Hors, il me semble que ces marqueurs s’avèrent être des gènes de résistance aux antibiotiques de dernière génération. Etant donné que le transfert de gènes vers les bactéries est monnaie courante, n’y a t-il pas un risque d’amplifier le phénomène de multi-résistance aux antibiotiques des bactéries ?

    Du point de vue socio-économique :
    Il me semble avoir lu que le rendement des PGM était au mieux équivalent aux non-PGM, le gain de résistance aux insectes ravageurs étant compensée par une fragilité « structurelle » des PGM.
    En outre, la résistance systémique et ciblée des PGM à un ravageur donné ne confère-t-elle un avantage compétitif aux autres ravageurs, qui pourrait se traduire par l’application d’une spectre plus large d’insecticides ? D’ailleurs, ce schéma peut-il être transposé aux PGM round-up ready ? Celui-ci détruisant tout sur son passage, n’est-il pas laissé à disposition des ravageurs que la plante cultivée comme ressource alimentaire.

    Encore merci pour votre article.

  • Merci pour avoir pris le temps de structurer et rediger cet article. Le sujet est en effet autant sensible que complexe : pas évident de naviguer entre le bribes d’information de chaque côté, la désinformation ou le manque d’attention, malheureusement aussi.
    Vous faites référence à vos collègues de l’INRA pour les études sur la toxicité, l’impact sanitaire, évoquant en gros les seules études valables dans le domaine, or cet institut semble uniformément donner les mêmes réponses rassurantes sur le sujet. Est-ce que pour autant celà voudrait dire que les autres études, nettement moins rassurantes, sont complètement biaisées voire malhonnêtes ?

    Par ailleurs le risque sanitaire des PGM résistants à des herbicides n’est pas évoqué dans ce chapitre. On sait que les herbicides sont toxiques pour l’homme (sans aller jusqu’à d’éventuelles maladies il y a déjà la baisse de fécondité) alors pourquoi des plans qui digèreraient un herbicide seraient moins toxiques ? Oui le glyphosate est censé être innofensif (pas d’études sur 20-30 ans), mais les agents actifs qui lui permettent de faire son petit effet ?

    Bref, quelles que soient les études on arrive aux méchantes multinationales qui veulent contrôler le vivant ; ça fait peur, mais peut-être moins et en tout cas pas tout de suite par rapport aux doutes sur le bien-fondé d’ouvrir les vannes aux OGM.

  • Voilà un texte très pédagogique qui mérite une large diffusion. Comme Tristan Nitot, je viens de le relayer par mon propre blog mais le diffuser sur un support comme AgoraVox pourrait démultiplier les gens y ayant accès. Qu’en pensez-vous ?

  • Je rejoins Viktor pour votre article. Pour ma part, je crois que le fond du problème n’est pas (et n’a jamais été) la science, mais ce que l’on en fait. En toute honnêteté intellectuelle, je me vois mal comme vous l’avez dit justement « voir le vivant totalement breveté » pour quelques multinationales.

    Problème : seules ces multinationales ont l’assise monétaire pour financer les recherches… alors, comment peut-on faire confiance ? Est-ce que l’éthique ne va passer à la trappe devant les intérêts commerciaux ?

    Un autre gros problème est la pollution au niveau de l’information : tout (et surtout n’importe quoi) est dit… alors, l’individu lambda comme moi applique le principe de précaution.

  • Merci pour cet article pédagogique qui permet de resituer les enjeux de la problèmatique dans toute sa complexité.

    Courtoisement

    Damien Babinet

  • @ Bertrand Lemaire : Merci d’avoir relayé l’info. AgoraVox est une excellente idée, il est des évidences à côtés desquelles on passerait facilement sans un aimable rappel de nos lecteurs !
    Je m’en vais négocier ça avec l’auteur…

  • Par J C Bregliano 

    @2+2=5 :

    Un commentaire pertinent qui demande plusieurs réponses.
    Je vais tenter de ne pas être trop long.
    Pour ce qui concerne les résistances aux antibiotiques : C’est un des points les plus critiqués par les opposants aux PGM et je trouve que ça ne manque pas de sel !
    Explication :
    1) Pendant de longues années, les médecins qui prescrivaient des antibiotiques, donnaient en même temps des bactéries porteuses de résistances à ces antibiotiques (résistances génétiquement transférables !). Comme d’autres généticiens, je dénonçais dans mes cours le danger de cette pratique, sans grand résultat. De même, les antibiotiques on été utilisés pendant très longtemps dans les élevages d’animaux, notamment les veaux. Le résultat est qu’actuellement, plus de 50% de nos bactéries intestinales sont résistances aux antibiotiques majeurs. Je trouve amusant que cela n’ait jamais soulevé l’opposition de personne, sauf lorsqu’il s’agit des PGM.
    2) Ces marqueurs ne sont plus autorisés pour les nouvelles demandes de mises sur le marché de PGM. Ils vont donc progressivement disparaître complètement des plantes cultivées.
    3) Le plus intéressant (et amusant) : des chercheurs de l’INRA de Lyon viennent de montrer après des études détaillées sur les bactéries du sol (des sols où il n’y avait jamais eu d’OGM) qu’elles possédaient pratiquement toutes des gènes de résistance à des variants de toutes sortes d’antibiotiques. Certaines possèdent jusqu’à 20 résistances à la fois. Tout compte fait, il ne faut pas être surpris. Les antibiotiques font partie de la lutte que les microorganismes se livrent entre eux dans les conditions naturelles. Ces chercheurs vont même jusqu’à conseiller de continuer d’utiliser ces gènes de résistance comme marqueurs pour les PGM, puisqu’ils font déjà partie des milieux naturels et n’apportent donc aucune perturbation dans les écosystèmes du sol.

    La suite de vos commentaires ne relève pas directement de ma spécialité. Soyons bien clair : mon propos n’est absolument pas de répondre à toutes les critiques contre les PGM, mais simplement de chasser certaines idées fausses, plus fantasmatiques que réelles.
    Mes réponses sont donc à prendre sous toute réserve.
    a) Certains PGM actuels ont en effet un rendement moindre que les variétés non-PGM (cultivées avec pesticides), cela est dû au fait que la transformation génétique a été faite à partir de variétés maintenant dépassées par la sélection classique. C’est une situation qui ne devrait être que conjoncturelle.

    b) La résistance systémique à un ravageur primaire peut en effet conférer un avantage à des ravageurs secondaires. Pour le moment, il ne semble pas que cela soit le cas pour le maïs, mais c’est le cas pour le coton qui est soumis à de nombreux ravageurs. Pour cette plante, l’utilisation plantes Bt ne dispense donc pas d’utiliser d’autres insecticides, mais à des doses faibles par rapport à celles nécessaires sur le coton non-Bt contre le ravageur primaire. Votre question sur les PGM roundup ready est sans doute aussi à prendre en considération, mais je ne connais pas de réponse actuelle.
    Vous soulevez des problèmes écologiques bien réels, pour lesquels seules des études de suivi peuvent apporter des réponses. Les écosystèmes n’ont rien de stables, ils sont en perpétuelle évolution, avec ou sans l’intervention humaine. C’est pourquoi les pays européens ont mis en place des dispositifs de suivi (comité de vigilance) pour les cultures OGM (quand il y en a) et financent ce type de recherche.

    Merci de vos réactions constructives et excusez la prudence de mes réponses sur les questions purement agronomiques. Je vous conseille la lecture du livre que je cite dans mon texte (A. Gallais et A. Ricroch).

  • Par J C Bregliano 

    @ viktor :
    Vos questions pertinentes peuvent me permettre de compléter mon texte dont je me suis efforcé de contrôler la longueur.

    1) Pour les études de toxicité, j’ai appris moi aussi beaucoup de choses en me plongeant dans les publications scientifiques et les textes d’organismes officiels internationaux. La phrase de Gérard PASCAL que je cite me paraît bien résumer la situation.

    Il faut bien réaliser que des études de toxicité pour les aliments ne s’improvisent pas, elles sont très délicates à mener. Aussi y-a-t-il, depuis une quinzaine d’années, des rencontres régulières au niveau international entre spécialistes de la nutrition et toxicologues de quantités de pays. Après des discussions très ardues, ils ont défini des principes et des méthodes de travail très strictes pour tous les laboratoires publics et privés qui font des études de toxicologie alimentaire. On appelle cela les BPL (Bonnes Pratiques de Laboratoire), plus souvent GLP (sigle anglais).
    Les laboratoires dans le monde dont les travaux sont reconnus par les organismes de contrôle de tous les pays, l’AFSSA pour la France et l’EFSA pour l’Europe sont également soumis à une « assurance qualité », c’est-à-dire soumis à des inspections qui vérifient l’application de ces normes internationales. Seuls les travaux de ces laboratoires sont pris en compte par les organismes officiels de contrôle sanitaire, ce qui explique que les travaux de certains laboratoires ne sont absolument pas pris en considération. Vous pouvez trouver de la documentation sur ces GLP sur les sites de l’US-EPA ou l’US-FDA. Elles sont aussi décrites dans deux directives européennes: 87/18/EECC2 et 88/320/ EECC3. Il y a également un texte de 140 pages sur le site de l’OCDE.

    Le problème pour la France est qu’il n’y a que très peu de laboratoires de toxicologie qui répondent à ces critères. Il y en avait un de l’INRA à Toulouse mais je ne sais pas s’il est toujours reconnu. Cet organisme exerce d’ailleurs une forte pression sur ses propres labos de toxicologie pour qu’ils se mettent sous assurance qualité. Mais ce n’est pas simple, seul le ministère de la santé peut donner ce label à la suite d’inspections.
    Voilà les éléments de réponse à votre question, quand à savoir si les gens qui font état « d’autres études, nettement moins rassurantes », sont malhonnêtes ou simplement pas sérieux, je n’en sais rien et ça ne m’intéresse pas beaucoup. Ce que je sais par contre, de source sûre, c’est que des chercheurs (de laboratoires non labellisés) ayant abordé ce type d’étude se sont fait imprudemment piéger par des journalistes dont la seule motivation était de faire de l’audimat ou de vendre du papier. Leurs résultats et leurs conclusions prudentes ont été présentés de façon très biaisée, voire falsifiée. Ces chercheurs ont eu des problèmes avec leur organisme de tutelle, car ce genre d’imprudence est très mal vu dans la communauté scientifique qui n’apprécie pas que l’on se fasse de la publicité à tort et à travers.

    Il est de bon ton de reprocher aux scientifiques de ne pas « communiquer » assez avec les citoyens mais les media ne nous facilitent pas les choses, nous sommes contraints à la méfiance.

    2) Je n’ai pas parlé des PGM résistants aux herbicides totaux, car ils ne sont pas autorisés en France ni, je crois, dans toute l’Europe.
    Le glyfosate n’est pas inoffensif, vous trouverez des analyses détaillées sur le site de l’AFSSA : http://www.dive.afssa.fr/agritox/ph
    Pour l’instant, il ne semble pas avoir d’effet cancérogène mais on ne peut exclure que des études plus fines nuancent un jour cette affirmation, comme c’est le cas pour beaucoup de choses, y compris les aliments conventionnels et bio.
    Ce que disent certaines études, c’est qu’il serait moins dangereux que des herbicides sélectifs utilisés actuellement, l’atrazine par exemple, qui était très bien pour la culture du maïs, a dû être interdite.

    3) Vous craignez l’ouverture des « vannes aux OGM », mais pour le moment c’est l’inverse qui se passe.
    Des organismes publics, comme l’INRA, on dû abandonner des recherches sur des PGM à cause des fauchages de leur parcelles d’essai et certains de ces PGM sont maintenant sortis par Monsanto.

  • Par J C Bregliano 

    @Bertrand Lemaire
    Merci pour vos commentaires sympa et pour avoir relayé mon texte par votre blog. Votre suggestion pour Agoravox est intéressante. Je ne connaissais pas ce site; après l’avoir visité, ça me parait être une bonne idée, je vais voir ça avec Serge.

  • Par J C Bregliano 

    @ Nico

    Le problème que vous soulevez sur « l’assise monétaire » pour financer les recherches est un problème de fond, lié au type de société dans laquelle nous vivons.
    Commençons par être utopiste: si ce sont les multinationales qui ont les plus gros moyens, c’est parce que nous sommes dans une société mondiale où toute les structures économiques et financières sont faites pour drainer les richesses créées vers le secteur privé, nous en avons une illustration caricaturale en ce moment en France avec la privatisation au pas de charge de tout le secteur public. Il n’y a là aucune fatalité, ce système économique et cette mondialisation ont été construits délibérément par ceux dont elle sert les intérêts. Si les peuples ne changent pas les choses, on court à la catastrophe planétaire.

    Restons maintenant plus terre à terre. Tous les moyens financiers ne sont quand même pas entre les mains des multinationales. L’INRA, premier organisme public européen de recherche agronomique et second organisme mondial, a les moyens de faire des recherches de haut niveau dans une tout autre optique. Malheureusement, comme je le dis dans ma réponse à « viktor », ses essais expérimentaux de PGM sont systématiquement détruits par des fauchages et plusieurs recherches ont été abandonnées. Monsanto et les autres en ont profité pour prendre le relais.
    Il y a aussi cette expérience intéressante, de « Génoplante » qui regroupe des forces du public et du privé avec un contrôle public assez fort, à ma connaissance.

    Le contrôle public des recherches appliquées, dans tous les secteurs, est une question éminemment politique. Là encore,ce qui se passe sur les « réformes » de la recherche et des universités en ce moment en France caricatural et très inquiétant.

    Quant au principe de précaution que vous invoquez, il n’est pas facile à manier. Pour beaucoup de gens il signifie « ne rien faire » et ne sert souvent qu’à masquer d’autres motivations . Qui a invoqué le principe de précaution pour les téléphones portables qui ont envahi le marché à une vitesse record?

  • Je rêve du jour où l’être humain aura une prise USB derrière l’oreille. Ainsi, lorsqu’on croisera un de ces innombrables « Circonspect-Par-Ignorance », il suffira d’une connexion pour lui injecter le fichier Jtesplik_theme.knw porteur de toutes les infos qui lui permettront d’être réellement critique. Son libre arbitre fera le reste.
    Et mon premier fichier pourrait bien s’appeler Jtesplik_Ogm.knw !
    Merci M. JCB, et bonjour à ce cher Serge.
    Popach’

  • Vous oubliez, dans vos « scientifiques » déclaration, le fait que « l’équivalence en substance » N’ EXISTE PAS. Oserez-vous avancer que le métabolisme d’une PGM n’est pas modifié AU-DELA du gène introdui? En tant que scientifique, comment pouvez-vous mesurer ACTUELLEMENT les conséquences sur la santé humaine, qui ne seront vraiment mesurables que dans des dizaines d’années. Les « améliorations » réalisées après la guerre sur le blé et d’autres céréales ont déjà leurs conséquences, et bon nombres de mes patients se trouvent grandement soulagés du fait d’exclure de leur alimentation ces céréales boostées en gluten. QUI DECIDE DU BIEN FONDE DES « AMELIORATIONS »? Quel est le but? Améliorer le rendement? S’inquiéter de la santé?
    Comment osez-vous faire croire que le but des PGM est de nourrir la planète? Même les agro-semenciers n’osent plus l’avancer. Des articles présentés de façon scientifique, comme celui-ci sont très dangereux.

    Vous pointez l’incohérence de certaines réactions, mais votre propre naïveté est touchante. Croyez-vous une seconde que les commerciaux de tous poils (même français) ne feront pas passer le DOLLAR avant la santé?

    Puisque vous vous réclamez de l’INRA, lisez le courrier de l’environnement de l’INRA de février 2008… Sur ce qui se passe en espagne.
    Etes-vous manipulé? Payé? par Monsanto que vous semblez dénoncer pour proposer un Monsanto français.

    Si l’europe veut faire de l’argent, elle doit prendre une autre voie, bien plus lucrative à long terme: la voie de la qualité, avec une garantie de produits non contaminés, avec 0,OOOOOOOOO % d’OGM. Que les Etats-Unis s’arracheront quand les systèmes digestifs américains surmenés par les protéines modifiées ne sauront plus faire face qu’à grand renfort de médicaments (que les « scientifiques  » mettront au point , nous n’en doutons pas).

    L’humanité a-t-elle intérêt à mettre tous ses oeufs dans le même panier?

    Ne peut-on « attendre et voir? » ce qui se passera aux Etats-Unis dans 50 ans? Etudier sur la durée…

    Où est l’urgence? A part faire du Dollar ou des Euros… AU choix.

    Vous êtes peut-être scientifique, mais vous allez un peu vite pour valider une méthode dont les caractéristiques inédites ne peuvent pas être appréciées scientifiquement à présent;

    Je suppose que vous ne publierez pas ce commentaire. Transmettez le juste à l’intéressé, s’il vous plait.

  • Par J C Bregliano 

    Je me disais aussi qu’il n’était pas normal que je n’aie pas encore reçu de commentaire passionnel, bien représentatif d’un certain courant. Je commençais même à ressentir une certaine frustration ! Mais voilà, la lacune est enfin comblée avec le commentaire n°12, tout est rentré dans l’ordre ! La panoplie est presque complète, depuis certains fantasmes traditionnels jusqu’à l’insulte d’être vendu à Monsanto, insulte très en vogue cette année depuis qu’une journaliste très médiatisée en accuse tous ceux qui critiquent son travail. Il serait totalement vain de répondre à ce genre de commentaire, mais je souhaite quand même saisir l’occasion pour compléter mon texte à l’intention de ceux qui s’intéressent sérieusement à la question des PGM [Pour l’information des lecteurs, je signale quand même que l’article du Courrier de l’Environnement de février 2008 sur l’Espagne est dans une section de la revue qui s’appelle « Autres repères, autres paysages » et n’est pas écrit par un chercheur de l’INRA mais par quelqu’un qui est trésorier d’Inf’OGM et faucheur d’OGM].
    Dans mon texte, j’ai délibérément passé sous silence, pour ne pas le rallonger encore, le concept « d’équivalence en substance ». J’en profite donc pour en parler, car certains journalistes et certaines organisations d’opposants aux PGM, lui font dire tout le contraire de ce qu’il est. En effet, on peut entendre et lire que ce concept signifierait qu’il ne serait pas nécessaire de tester les PGM du point de vue de la sécurité alimentaire car on peut les considérer comme ‘équivalentes’ aux plantes conventionnelles, point barre ! La réalité est exactement à l’inverse. Ce concept et les pratiques qui en découlent ont été élaborés il y a une dizaine d’années et retravaillés à plusieurs reprises dans des réunions internationales, non sans vifs débats. N’étant pas moi-même compétent en matière de sécurité alimentaire, je vais citer un directeur de recherche qui a participé (et qui continue à participer) à ces réunions.
    « Puisque les méthodes traditionnelles de la toxicologie alimentaire sont difficilement applicables aux aliments, il s’agit de comparer la plante génétiquement modifiée, ou les aliments qui en sont issus, à un comparateur : la plante génétiquement la plus proche possible à n’avoir pas été génétiquement modifiée. On compare alors les caractéristiques entre ces deux plantes. Il s’agit du concept d’équivalence en substance. De multiples rapports ont été rédigés sur le sujet auprès de l’UE, de l’OCDE, de l’OMS. »
    Donc, bien loin de traduire une position à priori, ce concept recouvre une démarche expérimentale exigeante. Les lecteurs qui veulent savoir comment cela se traduit concrètement peuvent aller consulter les avis et rapports de l’AFSSA ou de l’EFSA sur des PGM particuliers, qui sont publiés sur les sites de ces organismes. Ils y verront que les caractéristiques en question concernent, entre autres, la toxicologie, l’allergénicité, l’évaluation nutritionnelle, etc…
    Mais pour être complet, il faut aller plus loin. Le même chercheur écrit aussi quelque chose qui revient souvent dans les déclarations des toxicologues et nutritionnistes et que j’ai repris dans mon texte : les PGM et les aliments qui en dérivent sont actuellement, et de loin, les plus contrôlés. Il regrette, comme d’autres, qu’il n’y ait pas plus de contrôle sur les plantes et aliments conventionnels et surtout sur ceux issus de l’agriculture biologique, dont de nombreux chercheurs en agronomie considèrent, avec des arguments très sérieux, qu’elle est loin d’être dénuée de risques. Je cite d’ailleurs un exemple sur le maïs dans mon texte, à propos des mycotoxines, mais il y en a bien d’autres. Ceci dit, il est évident que les pesticides non plus ne sont pas dénués de risque !
    Pour ma part, je préfère aussi consommer du « bio » mais sans me faire trop d’illusions.
    Il faut s’y faire : les croyances et la réalité ne font pas toujours bon ménage ! La Terre n’est pas plate et le soleil ne tourne pas autour !

  • @ Barbara : Je n’ai pas l’habitude de pratiquer la censure sur mon blog. Comme vous avez pu le constater votre commentaire est apparu sur le champ. La modération se passe ici à posteriori. La raison en est assez simple : je pars du principe que si mes lecteurs passent du temps à rédiger un commentaire, c’est parce qu’ils souhaitent participer à une discussion constructive, et qu’il n’y a donc pas lieu de censurer. Les raisons qui auraient pu faire que votre commentaire soit retiré dans la foulée reposent sur la forme et non le fond. Une discussion constructive s’établit dans le respect et la politesse, il y a toujours moyen de faire connaître son point de vue à partir du moment où l’on ne s’exprime pas comme un goujat ! De ce point de vue là effectivement, votre commentaire est passé près de la censure, le ton quelque peu enflammé qui a été employé n’était absolument pas nécessaire.

    Par ailleurs, je tiens à préciser que ce blog n’est financé par aucun organisme ou structure extérieure (vous noterez au passage l’absence volontaire de publicité). Il m’appartient en nom propre et j’en assume seul les quelques frais annuels ce qui me permet d’être libre de tout engagement et de pouvoir publier ce que bon me semble dans le seul cadre de la légalité française. Pour moi, un blog est un média d’expression permettant le partage de connaissance et le retour des lecteurs. C’est d’ailleurs en ce sens qu’a été publié cet article.

  • l’emploi de la génétique n’est absolument pas un soucis

    c’est la continuité du manque de considération sur l’environnement et son impact industriel qui est décrié.

    Il est évident que cest une technique salutaire et efficace pour produire de meilleurs aliments

    il est évident que l’homme a depuis longtemps créé de nouvelles plantes avec des moyens bien plus aléatoires, l’ogm est une amélioration

    il est évident que la nature nous a pas attendu, de reste, elle n’attends rien, elle est.


    Simplement, le vrai souci posé par les vrais Environnementalistes est le suivant : L’impact sur l’environnement par l’inéluctable propagation d’énièmes nouvelles plantes

    L’outil est efficace, on peut simplement s’inquiéter d’une explosion donc de nouvelles espèces.


    La question de l’industrialisation du vivant n’est pas à éjecter comme des élucubrations d’illuminés qui veulent manger des racines.

    Elle n’est pas nouvelle, cette question. Elle concerne l’industrie, les agriculteurs, les pays émergents, la population.

    Elle pose des défis conséquents face aux intérêts des laboratoires qui investissent et face à l’intérêt du public qui est dépassé.

    La génétique permet encore plus facilement, ce que bien des industriels voulaient faire avant.

    Ce n’est donc pas la génétique le problème en soi, mais la volonté derrière. Tout simplement c’est l’ensemble du copyright, de la notion de bien public, et de gouvernance mondiale qui doit être réévalués à l’aune des nouvelles technologies, nouveaux défis économiques et nouvelles possibilités industrielles.

    Comprenons nous bien : la génétique n’est qu’un formidable outil qui met en exergue de vielles questions IMPORTANTES. Il faut les REGLER.

    Si cela vous choque qu’on passe par l’exutoire (hypocrite) ogm pour provoquer la mise à plat, on s’en accommodera.

  • En tant qu’informaticien, mon premier réflexe est de dire que ma merveilleuse passion n’a jamais sauté à la gorge de quiconque et que le processeur ne veut pas faire mal.

    Mais il m’est apparu avec le temps qu’il y a toujours un impact culturel, politique, industriel, voir même social à une technologie, même si elle peut m’apparaître comme la conséquence logique de 100 ans de travaux et qu’elle n’est que l’expression de souhaits communs.

    Et que je ne peux pas balayer les mises en questions en disant « chut, luddites ! »

  • Par yildiz 

    Bonjour,
    en fait, j’avais un Devoir Maison sur ce sujet, mais je pense pas avoir bien compris les points positifs, négatifs des OGM, et surtout qu’est ce que ça apporte, pourquoi il y a tant de débat à ce sujet??

    Merci…

  • Par sylvain 

    très interessant d’avoir un point de vue scientifique sur la question surtout que c’est par la science qu’on a mit en place les OGM! je me suis acheté un terrain, j’y réalise mes collier plastrons dans mon atelier que je vends sur http://www.ithemba.fr et je cultive mes propres légumes c’est mieux comme ca

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